Aujourd'hui, vous êtes comme un bon écolier, fier de vous, heureux du travail accomplit,
vous ne vous pensiez pas capable d'aller jusqu'au bout de votre idée.
Depuis des mois, vous avez constaté la puissance du Verbe. Jouer avec les mots, avec les expressions, avec les synonymes, enfin avec tous ce que composent une belle phrase et cela vous a enchanté.
Coucher sur le papier tous ces lexies qui habitent les méandres du cerveau, obéir à la main qui démange, s'essayer à la syntagme...vous avez enfin réussi à surmonter tous les obstacles qui, depuis des années vous empêchaient d'assouvir votre envie.
L'écrit terminé...reste à accomplir le plus audacieux...se faire lire!
Timidement, à recculont vous avez distribué autour de vous les feuillets que vous n'osez encore appeler manuscrit...puis, devant les résultats favorables...
Mais...ces lecteurs sont-ils objectifs?
Car après tout, ne font-ils pas partis du cercle rétrécit de vos relations...de votre parentèle...vous avez des doutes...
Vous surfez sur le net à la recherche...de quoi? Vous l'ignorez.
Une petite voix de plus en plus lancinante vous susurre d'envoyer votre texte...un pas en avant, trois en arrière...oserais-je ? ou pas ?
Non, moi poussière d' écrivain ... m'attaquer au landerneau littéraire , je délire.
Les nuits sans sommeil sont longues, les interrogations trouvant de plus en plus de réponses...enfin...un matin où le bon pied du lever fut meilleur que les autres jours, vous ouvrez l'ordinateur et tapez:
Maison d'édition.
Et là apparaît...oh! délice...une petite phrase qui accroche votre regard:
"Éditeur cherche auteur, même débutant, envoyer votre manuscrit par mail"
Exactement ce que vous recherchez.
Vos pieds ne touchent plus terre, votre coeur s'emballe, de plus "envoyer par mail" plus facile comme démarche, il suffit de cliquer, vous n'avez pas à réfléchir...
Vous cliquez cinq fois...après tout...
Commence alors la longue attente, l'oeil rivé sur l'ordi...L'espoir chassant le désespoir à grands coups de balais:
-ce que tu as écrit n'est pas si mal...
-l'histoire est intéressante...
-d'actualité...
-les copines aiment, certaines ont pleuré...
Au bout de trois semaines un peu plus pour d'autres, arrive enfin dans la boite aux lettres une grande enveloppe...fébrilement...vous la sortez en catimini, vous vous cachez pour l'ouvrir, votre coeur bat la chamade, les mains sont moites...
Miracle...
"Chère madame, J'ai le plaisir de vous annoncez que votre manuscrit intitulé....a su retenir toute notre attention.
"Nous sommes donc prêts à lui donner une réelle chance....
Vous devennez un géant,vous appelez la terre entière...vous allez être publier...bingo...
du premier coup vous décrochez un contrat...un des premier avant un prix littéraire, vous n'allez pas jusqu'au Goncourt, mais...Le Fémina...vous irait assez bien
Naturellement, vous finissez par lire ce contrat, le pourcentage que l'on vous propose, le prix du livre...vite la calculatrice...et puis plus loin,...bien plus loin:
le prix de la maquette!
Bizarre, vous ne pensiez pas que les auteurs payaient pour se faire éditer par une maison d'édition!
Comme entre temps, les 4 autres maisons, vous ont répondu la même chose, à quelques petites différences près, vous pensez que c'est une coutume inconnue du béotien que vous êtes dans cet univers des belles lettres.
Comme malgré tout la somme demandée est un peu rondelette vous allez à la pèche aux renseignements...
Et là votre ego en prend un coup, vous n'êtes pas la nouvelle Sagan, tant s'en faut, mais plutôt le nouveau pigeon entortillé dans les rets des éditeurs tomatés dans le livre "Audace de Roger Gaillard"
Pour les nouvelles plumes: à acheter sur le net...indispensable. pour savoir ou l'on met ses pieds.
Il vous faut tout recommencer.
Préparer une présentation correcte pour toutes les maisons d'édition que vous avez sélectionné.
Commence alors la ronde des photocopies, de la mise en page, du résumé du livre, de votre biographie, j'en passe ...Vraiment à vous dégoûtez de l'écriture! Faut-il un secrétariat de ministre pour envoyer un malheureux manuscrit, qui ne demande qu'a être lu par des gens indulgents pour le novice que vous êtes.
Nouvelle attente, mais ce n'est plus trois semaines, mais des mois...un, deux, six parfois plus, de quoi refroidir votre enthousiasme.
Puis commence les retours ou pas,
ouverts ou pas,
les lettres de refus ou pas...
Vous vous sentez nul d'entre les plus nuls.
Pourtant un soir, sur le net vous rencontrez une jeune maison d'édition,
une qui démarre,
une qui lit votre manuscrit,
une qui vous dit ce qu'elle en pense: je suis à la page 40 et je me régale!
enfin, une qui vous réconcilie avec l'écriture et vous fait rapidement oublier ce barnum que l'on nomme "comité de lecture".
Ragaillardie, après des échanges enfin constructifs, vous vous remettez à ce que vous aviez un peu mis de côté: L'écriture.
Et remerciez cette jeune maison d'édition, pour l'espoir qu'elle a généré.
Et souhaitez qu'elle réussisse dans ce métier certainement difficile, et truffé d'embûches.